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14h30 : c'est l'heure de la sieste, et pourtant il faut retourner en selle pour cette ultime étape du tour du territoire de Belfort. Etape à enjeux, évidemment : 3ème du général, maillot à pois et blanc (virtuellement) sur le dos, autant de combat à mener de front aujourd'hui.
Encore en train de digérer, je sais que j'ai une cinquantaine de kilomètres pour rentrer dans ma course avant les 1ères difficultés. Là, il faudra être devant non seulement pour engranger des points au classement de la montagne mais aussi pour tenter de dynamiter la course pour le général. En attendant, je traîne en fin de peloton, sans stress. Amusez vous devant, pour l'instant ce n'est pas mon combat. Au bout d'une heure de course, ma fréquence cardiaque moyenne atteste des moindres efforts réalisés : 142bpm, l'équivalent du haut de ma zone 1.
Pas loin de m'endormir, je tente de me réveiller à l'approche de l'enchaînement des difficultés du jour. À une dizaine de kilomètres de celles-ci je remonte à l'avant du peloton, et je ne suis pas le seul à adopter cette stratégie : le maillot jaune Domanico se replace également. De la même façon que moi, le leader s'étonne du rythme amorphe du peloton... alors qu'on nous annonce une échappée devant ! Qui serait pointé à plus de 2' ! Comme le crie Baptiste à ses collègues : "il faut y aller maintenant !". Sauf que la poursuite n'est toujours pas engagé, car le leader au général crève en prenant un trou, et est obligé de s'arrêter pour être dépanné.
La situation est d'autant plus inquiétante pour moi, que les difficultés suivantes sont synonymes de grimpeur. Avec tous les points à distribuer, si un même coureur passe en tête, je pourrais bien perdre mon maillot aux petits pois, mon si cher maillot... malheuresement, à part monter les côtes à bloc pour tenter de refaire notre retard, je ne peux pas faire grand chose. Dans la 1ere côte de 2ème catégorie de Gromagny, j'accélère dans les 500 derniers mètres, et parviens même à sortir. Accompagné par Gael Arnold, nous sommes repris juste avant le GPM hors catégorie de Saint Nicolas. Une nouvelle fois, je profite des grosses pentes pour imposer mon tempo, d'autant que je passe devant les encouragements d'Agathe venu exprès me voir. Mais cela ne suffit ni à reprendre les échappées, ni à prendre ne serait ce qu'un point, ni à lâcher mes concurrents : nous basculons en haut à une dizaine, et ma relance sur le sommet, suivi par le maillot blanc par procuration, ne suffit pas à créer le trou. En revanche, c'est bien un trou sur la route, au début de la descente, qui me fait dérailler. Si je parviens à régler le problème avec l'aide de mes concurrents, je comprends vite que le sort s'acharne sur les leaders du général aujourd’hui : mon dérailleur arrière est passé dn mode "sécurité" et ne bouge plus. Je suis donc bloqué... tout à droite, pouvant seulement changer petit et gros plateau.
Dès lors, je me vois déjà tout perdre. Le pois s'annonce déjà compliqué. Et maintenant, comment vais je faire pour rester dans mon groupe avec ce problème ? Et le dernier mur de la journée ? Impossible de le passer sur un tel développement, bloqué sur le 11! 
C'est finalement en roulant que je me ressaisis : en alternant petit et gros plateau, je peux réussir à soulager mes jambes et rester dans le groupe. Il faut juste que ça monte assez fort... donc j'en profite pour suivre quelques offensives, notamment des coureurs de Morteau, 2ème et 4ème au général. Malheureusement celles-ci ne donnent rien. La situation ne fait même qu'empirer, puisque le groupe se reforme par l'arrière, formant bientôt un peloton d'une cinquantaine, et les 2 échappées ne sont pas en vue devant. Peut être que la seule chose qui me donne du baume au coeur, est de voir que le paletot jaune de Domanico a retrouvé le peloton après une chasse qui a sans doute dû être épique.
Malgré quelques attaques qui parsèment le final, c'est bien vers une arrivée en gros comité que nous nous dirigeons. À 2km de la fin, je suis idéalement placé derrière le train de Belfort. J'arrive à ne pas trop me faire déborder pour aborder le virage à droite en bas de la côte dans les 10 premiers. Courbe à droite, et là : le mur. Avec mon braquet bloqué sur le 11 dents, je m'attends à me faire déborder de toute part. Et pourtant, pas du tout. J'ai de la force dans les jambes, et je fais jeu égal avec mes concurrents. La pente commence à se radoucir alors qu'on aborde la dernière ligne droite. Certains se rassient, mais moi je n'ai pas le choix : je fois continuer debout, tirer sur mon guidon comme un âne et pousser de toutes mes forces. Le moment est terrible : je me sens tellement bien, en capacité de déborder mes concurrents, mais mon braquet m'en empêche... si seulement j'avais ne serait ce que 10 tours par minute de plus, je pourrais relancer, remettre de la vitesse, sauf que c'est impossible... désemparé, je regarde la ligne qui semble encore si loin, et plus ça avance, plus mes jambes tournent lentement. Quand enfin je franchis la ligne, je déclipse immédiatement : non que je finisse totalement lessivé, mais plutôt que je ne peux pas, contrairement à mes adversaires, mettee tout à gauche. Debout au milieu de mes concurrents au sol, le regard dans le vide, cette fin de journée a un goût d'inachevé. Il en faudra du temps, pour digérer la déception de ces 2 journées. Se consoler avec une 3ème place et un maillot blanc. Oublier ce maillot à pois et cette minute perdu la veille bêtement. Se dire qu'à 18 ans, pour tout gagner, il y a encore le temps.



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Paul MULLER

TTB ét.3 - encore de la déception 😭 6ème

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